Cinéma et censure


 

Les limites de la liberté de création en France

Le cinéma, média de masse, a longtemps été considéré comme un phénomène public d’ampleur qui ne pouvait être laissé sans surveillance. La popularité du cinéma, sa place dans une culture de masse mondialisée et sans frontière, les effets culturels et sociaux qui lui sont prêtés ont souvent été avancés pour justifier un besoin de contrôle que la puissance publique en France a très tôt assumé. Mais quels publics de cinéma devraient être protégés ? Comment les censures s’exercent-elles ? Jean-Matthieu Méon (2005) constate l’euphémisation du contrôle public des médias du point de vue des principes à l’œuvre au nom de la protection de la jeunesse. Il distinguait la censure au sens juridique sur laquelle il indique qu’« au sens strict, la censure a aujourd’hui disparu et ne subsiste plus que pour des questions marginales telles que les publications étrangères (article 14 de la loi de 1881) et le cinéma – pour lequel les interdictions complètes ont totalement cessé d’être employées » d’une « censure qui se maintiendrait suivant une continuité ou qui serait cyclique et qui lui conférerait une actualité sans cesse renouvelée ». Devenant un art de culture légitime et savante, le cinéma qui, en France, est un art, une industrie et un média, se distingue des autres types de moyens d’expression artistique et culturelle en devenant une affaire d’État (Vezyroglou, 2014). Cette attention de l’État au cinéma était donc avant tout au service d’une série de précautions pour protéger le public ou certains publics devant les risques de troubles à l’ordre, le respect des bonnes mœurs, la protection des sensibilités individuelles ou communautaires… Elle allait conduire à la mise en place d’une vigilance jusqu’à justifier un examen systématique de tous les films avant leur sortie nationale. Cette censure du cinéma peut se définir à la fois comme un contrôle d’État préalable à toute diffusion depuis plus d’un siècle, obéissant à une jurisprudence susceptible d’être revisitée au nom de l’évolution des mentalités et comme un moyen pour pousser producteurs et censeurs à chercher et surtout à trouver des « compromis » acceptables pour les deux parties et qui échappent à la vue des publics. La « censure », c’est le nom couramment employé par les médias et les professionnels du cinéma en France pour désigner la commission de contrôle des œuvres cinématographiques, instance qui préfère se faire appeler « commission de contrôle » ou de « classification des films » et agir discrètement.

Couverture de la brochure La Commission de classification des œuvres cinématographiques. Source : Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

 

Quelques événements marquants dans l’histoire de cette commission de contrôle des films ont incité à identifier certaines lignes rouges à ne franchir un jour, certains seuils de tolérance à date, le curseur entre les limites que constituent l’autorisation de certains films par rapport à ce qui est considéré inacceptable et interdit. En l’absence d’un code explicite auquel les scénaristes, producteurs et réalisateurs pouvaient se conformer, comme le code Hays de 1930 à 1966 aux États-Unis par exemple, ceux qui se font appeler « censeurs » par les professionnels du cinéma et particulièrement ceux qui y ont eu affaire interprétaient l’outrage aux bonnes mœurs et mesuraient les risques de trouble à l’ordre public en s’appropriant eux-mêmes un faisceau de traditions qui se sont progressivement inscrites dans la jurisprudence de la commission de contrôle des films, couramment appelée « censure ». Il s’agit donc généralement pour la censure de mesurer les effets que les films examinés pourraient avoir sur les spectateurs et en contrôler l’impact de manière préventive. Comme la télévision française, longtemps très surveillée, le cinéma sera de plus en plus contrôlé dans la perspective d’une cause socialement très valorisée, celle de la protection de la jeunesse. Motif légitime d’une censure consensuelle, la protection de la jeunesse justifierait cette survivance de censure qui se fait désormais appeler « commission de classification des œuvres cinématographiques ». Des travaux sur la censure du cinéma en France établissent la corrélation avec les mesures de restriction d’âge qui ont fait de la commission de contrôle des œuvres cinématographiques une instance de protection de la jeunesse plus qu’une censure au sens juridique du terme. Jeanne Favret-Saada (2017), Arnaud Esquerre (2019) ou Georges Meyer (2019) définissent la censure par le caractère a priori des avis de la commission qui en a la responsabilité et des décisions du ministère de tutelle (depuis 1969, en charge de la culture) qui sont prises au nom de cette instance. Dans le champ des sciences de l’information et de la communication qui est le nôtre, l’étude de la réception du cinéma assimile les dispositifs de censure à toutes les formes de limitation de diffusion, d’exploitation et de consommation du cinéma (Ruby, 2018). Ce cadre théorique situe la problématique au niveau de la tendance politique à privilégier une éducation aux images et une école du regard que les spectateurs auraient à accomplir pour séparer d’eux-mêmes, c’est-à-dire sans censure préalable et a priori, le bon du mauvais (Ethis, 2005). Cette évolution d’une censure gardienne des bonnes mœurs juridiquement définie à une commission de classification des œuvres cinématographiques aux enjeux plus symboliques et socio-politiques a une histoire qui n’est pas linéaire et qui se poursuivra. Au nom des publics à protéger de spectacles pornographiques, violents, dérangeants, blasphématoires, subversifs, anti-républicains, racistes, anti-militaristes, anti-coloniaux, offensants, insultants, la censure du cinéma s’est organisée tout au long du XXe siècle. La censure cinématographique telle que pratiquée par la commission de contrôle des films cinématographiques (1945-1993), sous tutelle du ministère du Commerce et de l’Industrie (1945-1959), du ministère de l’Information (1959-1969), puis depuis, du ministère en charge de la culture, deviendra la commission de classification des œuvres cinématographiques en 1990, faisant de cette commission autrefois appelée « censure » une instance officiellement en charge de la protection des mineurs (Pozzi, 2018). Tout en faisant évoluer ses motifs en fonction de circonstances géographiques ou historiques, notamment depuis la Seconde Guerre mondiale, il en ressort une conception de la censure cinématographique qui repose sur une représentation du public français par les autorités et les membres de ces commissions. La censure du cinéma s’organise autour de plusieurs paramètres et modalités qui n’ont pas évolué au cours de ces 8 décennies. Depuis 1945, elle se fonde :

  • sur un rapport d’antériorité à la délivrance du visa d’exploitation par le CNC (2023) ;
  • sur une consultation, par le ministère en charge de ce contrôle, d’une commission spécialisée chargée de proposer des avis d’interdictions partielles ou totales, de subordonner ces avis à l’exigence de coupures, de suggérer des limitations d’exportation et de rédiger des avertissements destinés au public ;
  • sur la prolifération des filières de diffusion d’une œuvre cinématographique ;
  • sur l’interaction de cette commission de contrôle des œuvres cinématographiques avec d’autres instances qui ont également à se prononcer sur la qualité du projet de film qu’elles ont à apprécier.

 

Même si d’autres mécanismes de régulation ou de contrôle tels que la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA, 1982-1986), la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL, 1986-1989), le CSA (1989-2021) peuvent exercer une forme de contrôle, nous ne considérons pas pouvoir parler de censure puisqu’elles reposent sur un contrôle a posteriori et qu’elles se sont appliquées aux contenus audiovisuels et médiatiques. Laissant de côté le cinéma, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) cantonne son rôle à faire appliquer un certain nombre de mesures de diffusion télévisée de films de cinéma selon les décisions prises par la commission de classification des œuvres cinématographiques et entérinées par le ministère en charge de la culture. Cela étant dit, les motifs de censure se rejoignent. La loi n°2004-669 du 9 juillet 2004 limite la liberté de communication au public au nom du « respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion » et de la « protection de l’enfance et de l’adolescence, par la sauvegarde de l’ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité, pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle. » C’est donc toujours au nom de la protection du ou de public(s) ou d’enjeux de défense nationale que cette liberté de communication est limitée (Pierre, 2022)

En ce qui concerne ce deuxième axe d’intervention, la censure anticipait sur l’évolution du monde et sur des situations géopolitiques nouvelles. Cette tâche ambitieuse s’appuyait certes sur une jurisprudence d’ordre diplomatique relativement stable mais elle impliquait de la part de la commission de contrôle qu’elle se prononçait également en termes d’opportunités politiques. Elle devait se conformer aux intérêts diplomatiques de la France, comme il ressort du dépouillement des dossiers de censure que l’on a pu consulter (Garreau, 2009) .

En France, les affaires de censure cinématographique parmi les plus importantes remontent aux années 1960 à un moment où le cinéma subissait de manière de plus en plus frontale la concurrence de la télévision. Proportionnellement, si la surveillance du cinéma diminuait en intensité à partir des années 1960, augmentait le contrôle du ministère de l’Information sur la « télévision gaulliste » (Vassallo, 2005). En acquérant ses lettres de noblesse, il s’est progressivement libéré des contrôles des censures locales ou nationales, que celles-ci soient motivées par des raisons d’ordre laïques, religieuses ou politiques. Ces censures ont changé en fonction des mentalités et des conjonctures. Ce système explique en grande partie la complexité de cet imbroglio qui, à la différence d’autres pays, a rendu la censure cinématographique à la française assez imprévisible.

Dans un premier temps surveillé de manière soutenue, le cinéma français est progressivement devenu un moyen d’expression dont le législateur a fini par estimer qu’il devait être défendu comme un art. Le premier épisode de cette évolution est la loi sur le droit d’auteur du 11 mars 1957. Passant d’enjeux de liberté d’expression de la presse appliquées aux actualité filmée à ceux d’une liberté de création artistique, cette euphémisation de la censure cinématographique s’accompagnait d’une toujours plus grande considération pour un public éduqué et capable de faire ses choix lui-même.

 

Entre contrôle de l’État et intervention des censures locales

La première manifestation de la censure des films portait sur un document des actualités cinématographiques, le spectacle d’une quadruple exécution capitale, filmé sans autorisation à Béthune. En janvier 1909, une circulaire télégraphique du ministre de l’Intérieur, Georges Clemenceau (1841-1929), ordonnait aux préfets de France et d’Algérie de procéder à l’interdiction de la projection du film clandestin dans leurs départements. Le principe sur lequel reposait ce contrôle préfectoral est réglementaire. Au regard de la disposition concernant les motifs locaux qui en conditionnaient l’application, il restait bien arbitraire. Se référant à une classification des représentations par l’article 6 d’un décret remontant au 6 janvier 1864, le « Tigre » refusait aux spectacles cinématographiques le statut de représentations d’ouvrages dramatiques qui assurait la liberté de l’industrie théâtrale. Il les rangeait ainsi dans la catégorie des « spectacles de curiosités » à défaut de mieux. Désormais, ce contrôle local pouvait donc s’exercer sur le cinéma au même titre que sur les attractions foraines ou les spectacles de music-hall par exemple. Dès lors, les mesures prises par les maires et les préfets au titre de leurs pouvoirs de police ont été considérées comme des censures qualifiées de locales prises en fonction des habitants du territoire d’une commune ou d’une circonscription préfectorale (Ruby, 2017). Cet autre type de censure s’auto-justifiait très souvent par un prétendu laxisme de la censure d’État (Montagne, 2007).

Jusqu’en 1959 et un arrêt du Conseil d’État qui oppose la ville de Nice à la « Société des films Lutétia et Syndicat français des producteurs et exportateurs de films », dit arrêt Lutétia, les censures locales ne faisaient pas l’objet d’une réglementation très rigoureuse. Cet arrêt statue sur les initiatives des autorités en invoquant la notion de « circonstances locales » censées contenir le zèle de maires susceptibles de porter atteinte et préjudice aux libertés publiques et au droit du cinéma. Ces mesures de police municipale se fondent sur ces quelques mots :

« La moralité publique étant un des éléments de l’ordre public dont le maire doit assurer la sauvegarde, l’autorité municipale peut, compte tenu des circonstances propres à sa commune, se fonder sur le caractère immoral ou contraire à la décence d’un film pour en interdire la représentation. »

Cette censure entre les mains des autorités locales cohabite avec cette censure d’État qui, à partir de la Libération, d’abord paritaire entre représentants ministériels et représentants des professions cinématographiques, intégrera progressivement représentants d’associations familiales, intellectuels, experts tels que des éducateurs, juristes, psychologue en fonction d’une série de réformes entre 1950 et 1961. À l’inverse, cette censure locale plus ou moins pratiquée aura ses adeptes. Le plus célèbre est et restera Jean Royer (1920-2011) qui, en tant que maire de Tours, instituera une censure municipale chargée de visionner tous les films avant leur sortie dans les cinémas de la ville : « On ne me fera pas entendre que l’art cinématographique consiste à produire, à distribuer, à exploiter de pareilles saletés, ou alors ce serait reconnaître que cet art est tombé au dernier degré de l’abjection et de la décadence. » (Le Film français,1601, 21 nov. 1975) C’est le même J. Royer qui n’aura pas eu l’occasion d’échanger avec le philosophe Maurice Clavel (1920-1979) sur le plateau de À Armes égales en décembre 1971 sur l’ORTF que celui-ci quitta en lançant à la cantonade la célèbre pharase « Messieurs les censeurs, bonsoir ».

Globalement, ces censures locales, souvent de circonstance, prises dans la précipitation ou sous l’effet d’un contexte particulier ne nous intéressent ici quand dans la mesure où elles témoignent aussi des perceptions que certains édiles se font de leurs administrés, pour ne pas dire de leurs électeurs. Cette prise en compte directe des publics dans les décisions de ce type de censure municipale prenait le contrepied d’une censure d’État, nationale, jacobine, laïque (Le Cornec Ubertini, 2017). Les deux systèmes se sont souvent opposés. La censure d’État étant considérée comme plus permissive, les censures locales estimaient devoir organiser leurs propres contrôles en raison d’une auto-proclamée meilleure connaissance de leurs populations et donc des publics des cinémas de l’environnement immédiat. Mais dans les deux systèmes, dès leurs débuts, les thèmes et motifs de censure s’avèreront durables et intangibles. Soucieuses de « faire société », la censure d’État se distingue de ces censures locales, dispersées et dissonantes. Sujets à des fluctuations de la société française dans le temps, ses principes de la commission de contrôle des œuvres cinématographiques se redéfinissent en se revendiquant d’une jurisprudence souple et évolutive qui fait qu’un même film pouvait être présenté plusieurs fois à la censure au nom de l’évolution des mentalités.

Évitant le scandale et la polémique, la prose des censeurs de la commission de contrôle des films s’avère subtile et truffée d’euphémismes : les thèmes à traiter avec « tact », « discernement », « doigté » relèvent de la religion, la famille, l’histoire, la politique. Parmi les motifs de censure, figurent les représentations de la violence, du sexe susceptible de porter outrage aux bonnes mœurs ou de troubler l’ordre public. S’y ajouteront les interdictions pour apologie de la drogue ou d’incitation à la consommation de stupéfiants, ainsi que les cas de diffamation et de droit à l’image, les discriminations et même les mesures prises contre les films portant préjudice à l’image de la France dans le monde. Les dossiers de la censure cinématographique, c’est-à-dire ceux produits par les différents membres de la commission de contrôle des films de 1945 à 1990, recèlent d’avis motivés pour justifier les limites d’exploitation, les interdictions partielles et totales des films français et étrangers que ces « censeurs » soumettent à l’approbation de leur ministre de tutelle.

Cette contradiction entre censure nationale réputée plus clémente et censure locale mobilisée sur des considérations de circonstances locales et objet d’influences de la part de mouvements d’activistes un tant soit peu organisé est devenue un paradigme durable dont des scandales de censure proches de nous ont constitué de nouveaux cas emblématiques. Depuis la renaissance de la Jeunesse ouvrière chrétienne (dont le film J’ai dix-sept ans a subi les assauts en 1945 à Rouen) à la Libération jusqu’à l’association Promouvoir (à l’origine de l’affaire Baise-moi, film de Virginie Despentes et de Coralie Trinh Thi auquel le visa a été retiré en pleine exploitation en raison de scènes de sexe non simulées) en 2000, ligues de vertu et lobbies parviennent à interdire tel film en organisant des troubles à l’ordre public qui ont raison des édiles les plus craintifs (Leveratto, Montebello, 2011). Entre les arrêtés municipaux pris par les maires sur le principe de leurs prérogatives policières et les avis d’une commission de contrôle sous tutelle ministérielle, peuvent se loger des différences d’appréciation qui parfois malmènent la sérénité de la création cinématographique et surtout la prudence d’exploitants face à leurs publics.

 

Une pluralité de motifs de censure

Si les motifs de censure sont variés, ils ont tous en commun l’impression que les censeurs ont d’être les premiers spectateurs des films et d’être à la hauteur de leur responsabilité vis-à-vis du peuple français. Principe de précaution vis-à-vis des publics du cinéma, la censure s’économise si elle considère que les publics sont suffisamment murs et sains pour sélectionner, trier, choisir par eux-mêmes. Cette adaptation de la censure à l’état des mentalités présuppose la conscience que les censeurs auraient d’avoir affaire à un âge social symbolique qui ferait que le ou les publics de tel ou tel film serait mûr, précoce, attardé pour décider de ce qui est bon ou mauvais pour lui ou pour eux.

 

La famille et la religion

Parmi les thèmes suscitant vigilance, la représentation de la famille est une cause d’interrogation sur les valeurs patriarcales dès la Première Guerre mondiale. Elle devient encore davantage une cause d’inquiétude à la Libération, lors de la chute d’un régime vichyssois qui avait consacré les valeurs du travail, de la famille et de la patrie comme ciment national de la France. Pour autant, la censure de la nouvelle constitution politique ne pouvait reprendre à son compte les interdictions des adultères ou des divorces, qui caractérisaient la censure vichyssoise sous l’occupation allemande. Le contexte historique de l’après-guerre explique en grande partie le sort réservé à des films tels que Le Diable au corps (Claude Autant-Lara, 1947). En effet, les professionnels du cinéma français ne peuvent échapper aux bouleversements de la société française prise en étau entre épuration et reconstruction. La censure française, intégrant en son sein des membres du monde du cinéma, est à l’image des désordres de la Libération. Elle peut aller jusqu’à prolonger les décisions prises par les comités d’épuration, voire se reconnaître dans les pratiques d’une certaine épuration sauvage. À la Libération, le premier nouveau président de la commission de contrôle des films cinématographiques, Georges Huisman (1889-1957), conseiller d’État sympathisant communiste, se considère faisant partie des « gens qui font le cinéma » aux côtés des scénaristes, des réalisateurs, des acteurs, des exploitants en signant l’article « censeur » d’un ouvrage collectif intitulé Le Cinéma par ceux qui le font (Marion, 1949). Ce paradoxe n’est pas sans provoquer des remous et de diviser le monde du cinéma français. Dans ce contexte, C. Autant-Lara (1901-2000) réalise donc l’adaptation du livre de Raymond Radiguet (1903-1923) Le Diable au corps. Le producteur du film trouve à redire au premier scénario qu’on lui remet : « Aucune censure au monde ne laissera passer de telles scènes ». C. Autant-Lara se ravisent en fournissant un scénario dans lequel sont raccourcies les scènes d’armistice. Est totalement supprimée celle où François lit à Marthe un passage du poème d’Arthur Rimbaud (1854-1891) « Le dormeur du val ». Le 21 mai 1947, la commission de censure interdit le film aux moins de 16 ans. Le ministre décide de ne pas suivre l’avis de la censure et autorise le film à tous publics sous réserve que soit inséré dans le générique un carton où serait expliqué que l’histoire ne correspond qu’aux sentiments de seulement quelques jeunes Français durant la guerre de 1914-1918.

Ces avertissements de distanciation historique sont souvent des compromis trouvés à l’issue d’intenses négociations entre producteurs et censeurs. Les négociations peuvent se dérouler dès la pré-censure, c’est-à-dire la censure du scénario, ou après le tournage, voire longtemps après le final cut au nom de l’évolution des mentalités. Souvent invoquée à l’occasion d’un deuxième ou un troisième passage devant la censure, cette évolution montre bien que la censure revêt un caractère circonstancié. La censure française assume le fait de procéder par jurisprudence et non par une codification stable et prédéfinie, qui permettrait aux producteurs de savoir à quoi ils s’exposent précisément en amont du tournage. Les prévisions de décisions de censure s’avèrent aléatoires. Ainsi, aux débuts des années 1950, une réforme du contrôle cinématographique conduit-elle à l’entrée d’un représentant d’associations familiales dans la commission. Les professionnels du cinéma sont sur le qui-vive. Max Ophüls (1902-1957) réalise alors Le Plaisir et choque le Cartel d’action morale et sociale, qui adresse une protestation à la censure avant même le début du tournage. Ancienne Ligue pour le relèvement de la moralité publique, le Cartel a quelques faits d’armes tels que son influence sur la loi sur les publications destinées à la jeunesse (Crépin, 2001), Le scénario est examiné par la commission dans le cadre de la « précensure », terme en usage pour indiquer la possibilité offerte au producteur français de soumettre le scénario de tout projet de film avant le tournage :

« Ce scénario, à la lecture, m’a paru moins choquant que ne le laissait supposer la lettre du cartel d’action morale. Il est grivois, licencieux, jamais grossier, ni graveleux, et, il faut bien le reconnaître, assez typiquement français comme genre. Dans ces conditions, le “coup d’arrêt” à la spécialisation Max Ophüls, me paraît inopportun. L’avertir seulement que son film sera certainement interdit aux mineurs en lui recommandant, s’il ne veut pas s’exposer à pire, de traiter avec légèreté les scènes scabreuses. »

L’échec commercial du film aurait pu compromettre la poursuite de cette spécialisation. Il n’en fut rien et le film est devenu un classique quelques années plus tard.

 

La violence

La violence est une autre raison de censure. Dès la Grande Guerre, la représentation du cinéma comme école du crime est courante. Des scènes de réelles exécutions capitales aux représentations fictionnelles du banditisme, les scandales provoqués par des films considérés comme violents remontent au début de la censure. La conviction que de tels films entraînent une augmentation du banditisme par fascination et mimétisme relaye la préoccupation des pouvoirs publics d’une toujours plus grande et plus nécessaire protection de jeunesse réputée influençable, fragile et sensible (Hamery, 2022).

L’une des singularités de l’instance en charge de la censure française tient à sa composition. Depuis 1945, des représentants de l’industrie cinématographique (et non des moindres) y sont nommés. Par exemple, Louis Malle (1932-1995) représente les cinéastes à partir d’octobre 1962. Après avoir été lui-même victime de la censure, Jean-Pierre Melville (1917-1973) lui succède le 1er avril 1967. En effet, la censure avait recommandé l’interdiction du film Le Deuxième souffle aux mineurs de moins de 18 ans « en raison de l’excès de violence et du caractère délétère de ce film, qui en font un film particulièrement nocif pour les mineurs de moins de 18 ans et la “coupure intégrale de la scène de l’entonnoir, celui-ci ne devant même pas être aperçu. Cette pratique n’est pas dans les habitudes de la Police Française. » Ce sont les conditions imposées par le secrétaire d’État à l’Information dans une lettre du 25 octobre 1966 pour en autoriser la sortie. Georges de Beauregard (1920-1984) rencontra la censure française pour la première fois de sa carrière de producteur de films de la Nouvelle Vague avec La Religieuse (Jacques Rivette, 1928-2016). Comme le montre Pascal Laborderie (2021), le fait religieux ne saurait se filmer sans beaucoup de précaution (Favret-Saada, 2017).

 

La censure politique des représentations de l’histoire en marche

Plusieurs cas emblématiques de censure ont fait évoluer la jurisprudence de la commission des œuvres cinématographiques au point de faire apparaître une dérive très politisée de la surveillance gaulliste du ministère de l’Information.

Le temps de l’actualité géopolitique mondiale rattrape les enjeux de censure. L’évocation des événements d’Algérie s’avère compliquée à la télévision comme au cinéma : le sujet de la guerre d’Algérie l’est resté longtemps après les accords d’Évian qui scellèrent l’indépendance de l’Algérie en 1962. Le même G. de Beauregard produit Le petit soldat (Jean-Luc Godard, 1963) et rencontre de nouveau la censure. En pleine guerre d’Algérie, le censure ne pouvait tolérer de voir traiter ce thème de la désertion d’un jeune français au cinéma. En 1960, Louis Terrenoire (1908-1992), ministre de l’Information, reprend à son compte l’interdiction recommandée par les censeurs (13 voix contre 6, 1 abstention) en la justifiant ainsi :

  1. Les scènes de torture appellent habituellement de la commission les plus expresses réserves. La très longue représentation de scènes de ce genre dans Le Petit soldat est de nature à entraîner une mesure restrictive, en dehors de toutes autres considérations. Que ces tortures soient appliquées par des agents du FLN ne saurait modifier le jugement qui doit être porté contre ces pratiques et leur représentation à l’écran.
  2. L’action du film, située en Suisse en 1958, retrace certains épisodes de la vie d’un jeune Français déserteur. Son objet est d’analyser le comportement de ce jeune homme, les raisons profondes de son acte, ainsi que les attitudes qu’il est amené à prendre dans le conflit où il est impliqué. A un moment où toute la jeunesse française est appelée à combattre en Algérie, il paraît difficilement possible d’admettre que le comportement contraire soit exposé, illustré et finalement justifié. Le fait que ce personnage se soit paradoxalement engagé dans une action anti-terroriste ne change rien au fond du problème.
  3. Enfin, les paroles prêtées à une protagoniste du film et par lesquelles l’action de la France en Algérie est présentée comme dépourvue de tout idéal, alors que la cause de la rébellion est défendue et exaltée, constituent à elles seules, dans les circonstances actuelles, un motif d’interdiction.”

 

Sexualité, érotisme et pornographie

« Les Américains sont un peuple sain, ils ne veulent pas voir des situations sexuelles dégradantes » (Douin, 1998 : 241) : cette phrase de Joe Green, censeur de films hollywoodiens entre 1934 et 1955, « résume à elle seule le principe social qui organise toute censure » (Ethis, 2005 : 90).

Partout dans le monde, qu’il soit question d’érotisme comme de pornographie, la représentation de la sexualité est la cause de censure la plus évidente (Vörös, 2017). S’abattant sur The Kiss (1896) de William Heise (1847-1910), elle est même la première mesure de censure de l’histoire du cinéma. La plupart de ces censures sont nées de scandales inhérents à l’érotisme contenu dans les images cinématographiques. Dès lors qu’on filme des corps, qu’on cherche à les mettre en valeur ou à les dégrader, la censure se sent concernée. Ainsi est-il impossible de déterminer si l’érotisme est contenu uniquement dans les intentions du réalisateur ou dans l’esprit “mal tourné” des censeurs.

Face à la surproduction de films pornographiques au début du mandat de Valéry Giscard d’Estaing (1926-2020), Michel Guy (1927-1990), secrétaire d’État à la Culture, porta le projet de décret du 31 octobre 1975 puis par les articles 11 et 12 de la loi du 30 décembre 1975 (loi de finances pour 1976), fut à l’origine de la loi dite X (Jullier, 2008). Si progressivement, la production pornographique se reporta sur l’édition vidéo, puis sur le web, et abandonna le grand écran et le réseau des salles spécialisées, le débat sur le caractère pornographique d’un film refait surface régulièrement. Il a même cristallisé une polémique au tournant de l’an 2000 avec l’affaire Baise-moi de V. Despentes et de C. Trinh Thi. Comme annoncé précédemment, le film comprenant des scènes de sexe non simulé, l’annulation de son visa d’exploitation par le Conseil d’État en juin 2000, à la suite d’une plainte déposée par Promouvoir, une association de « défense des valeurs judéo-chrétiennes et de la famille » reposait très directement sur l’interprétation que la commission de contrôle des œuvres cinématographiques faisait de cette mission de classification. Devant choisir entre une mesure d’interdiction aux mineurs de 18 ans et une mesure d’interdiction aux moins de 16 ans, seule l’application d’un classement X pour pornographie ou incitation à la violence pouvait alors assurer une vraie interdiction aux mineurs. Considérant ce film comme un film d’auteur et non comme un film pornographique dont l’exploitation ne serait possible que dans un réseau de salles spécialisées alors déjà quasi inexistantes, la commission avait alors choisi de limiter l’interdiction aux mineurs de moins de 16 ans.

25 ans après la loi dite X, l’affaire de Baise-moi pouvait déjà sembler d’un autre âge. En devenant la commission de classification des œuvres cinématographiques en 1990, la commission historique qui assurait/assumait une mission de « censure » tournait la page de 45 années de pré-censure et de censure politique, morale et sociale pour faire de la protection de la jeunesse la mission cardinale de ses actions.

Toutefois, les termes de ce débat ressurgirent à l’identique face au film Pleasure de Ninja Thyberg quand il est examiné pour la première fois par la commission de classification des œuvres cinématographiques le 22 juillet 2021. La commission propose une interdiction aux mineurs de moins de 18 ans avant de se raviser, à la demande du distributeur, en faveur d’une interdiction aux moins de 16 ans. La commission de classification des œuvres cinématographiques a donc tout d’abord proposé une interdiction aux mineurs de moins de 18 ans, se justifiant par ces mots : « Le spectateur suit le parcours initiatique des coulisses du cinéma pornographique à travers les yeux d’une très jeune femme mais de nombreuses scènes intenses qui associent sexe et violences faites aux femmes sont de nature à troubler gravement la sensibilité d’un public mineur. » Le distributeur du film adresse le 23 juillet 2021 un courrier à Roselyne Bachelot-Narquin, alors ministre de la Culture, sollicitant un réexamen de la décision d’interdiction aux mineurs de moins de 18 ans, qui lui paraît excessivement sévère par rapport aux usages récents dans ce domaine, dont il rappelle quelques exemples. Le réexamen du film par la commission du 9 septembre 2021 donne lieu à un changement de recommandation. Le film n’étant pas « pornographique », une interdiction aux moins de 18 ans n’est cette fois-ci pas proposée. C’est finalement une interdiction aux mineurs de moins de 16 ans avec avertissement qui est adoptée selon l’avis suivant :

« La commission propose, après avoir revu une seconde fois ce film, une interdiction aux mineurs de 16 ans, assortie de l’avertissement suivant : “Plusieurs scènes de violences et d’agressions sexuelles sont susceptibles de troubler gravement le public” »

 

Conclusion

L’impression d’arbitraire qui situe la censure du côté de la morale publique plutôt que du droit n’est pas sans comporter une certaine tendance à la politisation des enjeux (Passard, 2019). D’une certaine manière, cette politisation trouve son origine dans la légitimité qu’estiment avoir les censeurs de parler au nom des publics de cinéma. Se considérant les mieux placés pour connaître les mentalités d’un peuple et pour accéder à l’état de l’opinion publique, les censeurs estiment ne pouvoir laisser leur pouvoir « uniquement aux bons soins des seuls individus » (Ethis, 2005 : 92). Quelle que soit le nom de celle-ci, ladite commission se fait l’écho d’un état des mentalités étroitement lié à des représentations collectives ou communautaires qui président à l’autocensure, au « politiquement correct » ou aux influences d’une « cancel culture » ambiante (Heinich, 2021). En cela, elle reflète un point de vue biaisé qui se présente comme un miroir déformant de la société française, des mœurs et des mentalités de la population, des éléments de la culture de masse, des perceptions politiques d’une contre-culture qui se diffuserait via les écrans, voire sous influence des minorités qui composent ce pays à un moment donné. Naturellement, face au degré de censure et d’acceptabilité sociale face aux interdits et aux tabous, jusqu’au début des années 2000, cette instance que la presse et les professionnels du cinéma continuaient d’appeler la censure se dote d’un arsenal de mesures – de la pré-censure à l’interdiction d’exportation en passant par les coupures, les restrictions d’âge, les avertissements – et fait montre d’une relative adaptation à l’état des mentalités considérées comme évolutives et changeantes. En 1990, Jean-François Théry, ancien président de la commission de classification des œuvres cinématographiques, publiait un manifeste au titre ironique Pour en finir une fois pour toutes avec la censure. Si au sortir des années 1990, en France, la censure change de visage et relève de censures économiques liées à la loi du marché, peut-on considérer cette censure économique comme symbolique et métaphorique ? Que reste-t-il de cette histoire d’une censure euphémisée avec le développement de nouveaux moyens de communication audiovisuelle et des phénomènes culturels dans une économie ouverte et mondialisée ?


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Auteur·e·s

Garreau Laurent

Dispositifs d’information et de communication à l’ère numérique – Paris Île de France Institut national supérieur de l'éducation artistique et culturelle Conservatoire national des arts et métiers

Citer la notice

Garreau Laurent, « Cinéma et censure » Publictionnaire. Dictionnaire encyclopédique et critique des publics. Mis en ligne le 07 février 2024. Dernière modification le 31 janvier 2025. Accès : https://publictionnaire.huma-num.fr/notice/cinema-et-censure.

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