Dans nos sociétés, une « double coupure délégative » semble séparer les représentants et représentés, d’une part, et les experts et les profanes, d’autre part (Callon et al., 2001). La première coupure, ordinairement mobilisée dans les débats autour d’une démocratie représentative entrée en crise, nourrit aussi bien le discours savant qu’elle alimente les représentations ordinaires. Moins immédiatement visible, la seconde coupure n’en est pas moins réelle et décisive. En effet, le gouvernement des sociétés est fondé sur un couple associant les décideurs politiques, habilités à faire les choix, et les experts, habilités à les éclairer. Depuis l’ordonnance de Blois (1579), premier texte à instituer en France le recours à l’avis d’experts pour éclairer le règlement d’une situation litigieuse dans l’exercice de la justice, « le recours à des experts dans la conduite des affaires publiques a essaimé de la sphère juridique vers d’autres espaces sociaux et politiques jusqu’à se banaliser comme une composante normale du processus de décision […]. On est entré dans le règne des experts » (Estades, Rémy, 2005 : 13). Dans un contexte de technicisation de la société et de l’administration publique, l’expertise s’impose comme une source de normativité décisionnelle à côté des normativités internes (produire des normes professionnelles pour ses pairs) et externes (produire un jugement dans un autre espace professionnel que le sien à l’image de l’expertise judiciaire ; Lascoumes, 2002). Du reste, l’expertise judiciaire devient le parangon de l’intervention savante en dehors de son milieu initial (Bantigny, 2011). Les arts de gouvernement ont de plus en plus reposé sur des connaissances scientifiques, marquant le passage d’un régime dominé par les structures de souveraineté à un régime dominé par les techniques de gouvernement des populations selon Michel Foucault (1926-1984). Cette question se retrouve dans plusieurs de ses ouvrages. On peut citer Surveiller et punir (1975) ou Sécurité, territoire, population (2004). Ce dernier livre reprend le cours prononcé par le philosophe au Collège de France, de janvier à avril 1978, dans lequel il étudie le biopouvoir, nouvelle technologie ayant pour objet la population qu’il relie au libéralisme comme rationalité gouvernementale fondée sur le principe du « laisser-faire ».
L’idée selon laquelle l’expertise éclaire les décideurs recouvre la configuration classique du modèle décisionniste tel que proposé par Jürgen Habermas (1968) lorsqu’il interroge le rapport légitime entre politique et savoir. Ici, le primat est accordé aux décideurs politiques, tenus de considérer une multiplicité de données pour arrêter leur choix. Dans une visée instrumentale, l’expertise informe et éclaire ainsi le personnel politique dont l’autonomie est en quelque sorte préservée. Les choix politiques sont irréductibles à la rationalité scientifique. A contrario, le modèle dit « technocratique » accorde le primat au savoir spécialisé sur le politique dont la décision se retrouve étroitement encadrée. Le choix des valeurs s’efface sous l’illusion de contraintes objectives. Les experts, ou plutôt des experts, réussissent à monopoliser savoirs et compétences pour cadrer les problèmes et pour formuler les solutions. Cette configuration ouvre possiblement sur la critique d’un pouvoir exorbitant conféré aux experts qui s’imposerait au détriment du pouvoir de décision des responsables politiques. À terme, la rationalisation des choix politiques menacerait l’autonomie de ces derniers et la spécificité de leurs propres critères de choix (Barthe, Gilbert, 2013). Encore faut-il souligner que les dirigeants politiques peuvent opportunément tirer un avantage stratégique lorsqu’ils se réservent la possibilité d’imputer un échec aux défaillances des « spécialistes » comme le montrent Harry Collins et Trevor Pinch (1952-2021) dans leur étude des usages des modèles de prévision économique (Collins, Pinch, 1998). Soucieux de dépasser cette alternative et de réarticuler rationalité scientifique et systèmes de valeurs, J. Habermas plaidait en faveur d’un troisième modèle qualifié de « pragmatique » dans lequel les experts s’apparentent à des intermédiaires entre les acteurs politiques et les citoyens. Ils contribuent, par leur expertise transparente et accessible, à alimenter les discussions collectives visant à formuler des solutions.
Mais peut-on réellement envisager l’expertise et ses protagonistes au singulier ? Sur un mode supposément homogène ? En réalité, définir l’expertise n’est pas chose aisée si nous considérons son multipositionnement. Les deux postures distinctes des experts judiciaires condensent assez bien les différences marquées, voire les antagonismes, des postures et rôles endossés par les experts. Dans la conception romano-germanique, l’expert judiciaire peut être qualifié d’expert du juge dans la mesure où il est inscrit sur sa liste et indépendant des parties du procès. Il est attendu de l’expert qu’il soit neutre et indépendant. Dans la conception anglo-saxonne de common law, il peut être qualifié de témoin expert, au sens où chaque partie prenante se présente devant le juge avec son propre expert. Il agit ainsi clairement au service d’une des parties. Rapporter l’expertise à un mode objectif de d’élaboration de l’intérêt général (logique consensualiste) est une voie restrictive. Lorsque l’expertise est située et en concurrence, il faut alors l’envisager non plus sous l’angle d’une scientifisation du politique, mais au contraire, comme une politisation de l’expertise, c’est-à-dire une ressource dans la compétition politique qui permet à certains groupes de défendre au mieux leurs intérêts et d’accroître leurs pouvoirs, leur procurant un avantage compétitif face à d’autres groupes pour peser efficacement (Saurugger, 2002).
Avant d’étudier plus avant l’expertise à travers ces deux figures principales qui se font face, celles de l’« expert mandaté » et de l’« expert avocat », mentionnons l’existence d’autres figures telles que les « experts médiatiques ». Ils occupent désormais une place centrale dans le discours d’information, occupant tout à la fois des positions d’informateur, d’autorité et de vérité, de médiateur-interprétateur, etc. Leurs interventions répétées suscitent régulièrement la critique relative au manque de diversité des experts invités, leur partialité et leur normativité (sous couvert d’expertise) ainsi que leur compétence (Campion, Van Wynsberghe, 2017).
L’expert mandaté : une expertise indépendante et consensualiste au service de l’intérêt général
La sociologue Irène Théry livre cette définition de l’expertise : « Une activité particulière d’exercice diagnostique du savoir en situation problématique, dans le cadre d’une mission intégrée à un processus décisionnel dont l’expert n’est pas maître » (Théry, 2005 : 312). Cette définition résonne avec la figure de l’expert mandaté, la plus prégnante dans la tradition française. L’expertise suppose ici l’existence d’une commande, une question adressée à des experts par des décideurs (Roqueplo, 1997). La légitimité de l’expert, censé faire preuve d’indépendance, lui est conférée par l’instance qui le mandate. Autrement dit, c’est la demande d’expertise qui commence par établir l’expert et non l’inverse (Restier-Melleray, 1990). Il faut ainsi distinguer l’usage du mot expert selon qu’il est employé comme adjectif (être expert de) ou substantif (être un expert). Dans ce dernier cas, le mot « expert » désigne une personne dont la fonction est de formuler une expertise en réponse à une demande sociale en vue d’intégrer une décision (Roqueplo, 1997).
La notion de « demande sociale » n’est pas dénuée d’un certain flou. Jusqu’où doit-elle être formalisée et revêtir les traits d’une commande ou saisine ? Ou peut-elle répondre à une demande sociale implicite, non clairement formulée et qui se construit dans les interactions ? Il arrive que les experts aient eux-mêmes contribué à stimuler la demande sociale d’expertise à l’image des géographes-aménageurs étudiés par Gilles Massardier (1996). Liés au courant de la « nouvelle géographie », ils ont savamment joué d’une multipositionnalité triangulaire pour rendre indispensable leur expertise sur le territoire et l’aménagement : fabriquer un nouveau savoir dans leur champ disciplinaire, créer ensuite un marché de ce savoir (conseil) et occuper enfin des positions dans le champ politico-administratif (commissions, comités, postes de hauts fonctionnaires).
Si les experts correspondent à des individus, il convient de souligner le caractère collégial croissant des expertises rendues, à l’image des agences créées dans le champ sanitaire (comme l’Agence française de la sécurité sanitaire des aliments [Anses] créée à la suite de graves crises sanitaires dans les années 1990). La collégialité doit permettre d’améliorer la qualité des avis rendus tout en garantissant leur indépendance (Lascoumes, 2005). Lorsque l’expertise répond à une demande sociale, le choix des experts est supposément fait en fonction d’une compétence reconnue (détention d’un savoir et d’un savoir-faire). Ici, les experts sont ceux qui font valoir « un point de vue déterminé en s’appuyant sur la maîtrise d’un savoir échappant au profane » (Traïni, 2014 : 470). Parfois d’ordre professionnel, ce savoir est souvent d’ordre scientifique. Mais lorsque les scientifiques deviennent experts, ils se retrouvent à travailler selon des règles et dans des contextes différents que lorsqu’ils réalisent leur activité de chercheurs. Travaillant dans un temps plus court imposé par les instances commanditaires, ils ne développent pas tant des connaissances nouvelles qu’ils rassemblent et synthétisent des connaissances existantes pour interpréter et les intégrer dans un schéma d’analyse cohérent en vue de répondre à une question décisionnelle d’ordre pratique. L’expert peut être caractérisé comme un spécialiste susceptible d’apporter au dossier qui lui est confié un capital de connaissances, constitué par ses soins, mais souvent élaboré par d’autres (Delmas, 2011). Pour les scientifiques, et en particulier dans les sciences sociales, l’expertise constitue l’un des rapports possibles que les chercheurs entretiennent avec le champ politique, se distinguant aussi bien de l’autonomie que de l’engagement. L’expertise n’étant pas réservée aux experts, les interventions des sociologues participent à coproduire une sociologie de l’État, éclairant sa direction, comme elles peuvent se mettre au service des profanes (Mauger, 1999).
Notons cependant que la figure foucaldienne de l’intellectuel spécifique fait directement se rencontrer l’expertise et l’engagement : « Les intellectuels ont pris l’habitude de travailler non pas dans l’universel, l’exemplaire, le juste-et-le-vrai-pour-tous, mais dans des secteurs déterminés, en des points précis où les situaient soit leurs conditions de travail, soit leurs conditions de vie » (Foucault, 1976 : 109). Là où l’intellectuel généraliste s’apparentait traditionnellement à la figure de l’intellectuel de conscience publique, l’intellectuel spécifique signale, lui, l’émergence d’une nouvelle forme d’engagement scientifique et expert. Considérant la dimension politique de son activité, il fait de la compétence technique le garant de la légitimité et de la pertinence de ses interventions. Il s’immisce ainsi dans des secteurs déterminés, se politise là où il dispose de savoirs spécifiques ou exerce ses compétences professionnelles (Dartigues, 2014).
Si la détention d’une compétence de spécialiste ressort comme un critère évident de choix des experts, il n’est pas rare que leur sollicitation réponde à des critères autres que la seule compétence. Outre l’urgence des désignations et l’ignorance relative des mandataires, la sélection des experts repose aussi sur un capital social (Neveu, 2015), comme l’illustre l’exemple du criminologue Alain Bauer dont le rôle d’expert mandaté comme d’expert médiatique semble très largement redevable de son capital relationnel. Concernant plus spécifiquement les experts médiatiques, leur disponibilité et leur capacité à s’exprimer en toutes circonstances peuvent l’emporter sur leur compétence stricto sensu (Solimando, 2017).
En matière d’organisation et d’encadrement de l’expertise, il convient de souligner la centralité de l’État savant français à partir de trois grandes modalités d’intervention (Le Bourhis, 2021). La première est une production en propre de connaissances (recherches, études, statistique) à partir d’une vaste machinerie bureaucratique (directions et services ministériels, instituts, agences, etc.), quand ce ne sont pas les hauts fonctionnaires eux-mêmes qui prennent en charge des activités d’expertises (à l’image des corps d’inspection lorsqu’ils s’emparent de l’activité évaluative). Cette modalité essentielle explique que l’expertise ait longtemps été invisibilisée en France (Restier-Melleray, 1990) en raison de sa confusion avec l’État. Ce dernier, à travers ses grands corps au service de l’intérêt général, ses directions d’études, ses services d’informations et de statistiques, ceux que Pierre Bourdieu (1930-2002 ; 1984) dénommait des « intellectuels d’administration », se considère depuis longtemps comme un producteur de connaissances sur la société. En ce sens, l’organisation française a longtemps été étrangère à la construction d’une connaissance partagée avec la société civile. La seconde modalité est un cadrage politique de l’expertise consistant à sélectionner, à arbitrer et à hiérarchiser entre types de savoirs. Enfin, la troisième modalité consiste dans la mise en circulation par l’État des savoirs autorisés dans l’espace public.
La monopolisation de l’expertise par l’administration française a commencé à se fissurer sous l’effet de critiques diverses. Ainsi, des comités de sages, des commissions d’experts, des agences ou encore des conseils se sont multipliés, marquant une progressive autonomisation et externalisation de l’expertise (Lascoumes, 2002). Là où Bruno Jobert (1992) avait précédemment évoqué la monopolisation de l’expertise par les appareils d’État comme une caractéristique de la construction du débat politique en France sur les politiques publiques, Steve Jacob (2004) évoque la mise en place d’un État français plus réflexif et les progrès d’une externalisation de l’expertise depuis les années 1970.
L’expertise au sens de l’advocacy : une activité au service d’intérêts et de causes
Si l’expertise est censée être affranchie d’une logique de représentation d’un intérêt social catégoriel et particulier lorsqu’elle est mobilisée par les pouvoirs publics, elle peut tout aussi bien se voir mobilisée à l’appui d’intérêts et en soutien de causes explicites.
Outre-Atlantique, l’expertise ressortit depuis longtemps à un quasi-marché aux idées et aux controverses situant ses promoteurs dans un rapport ouvertement concurrentiel. L’expertise n’est pas tournée vers une visée consensualiste, mais participe d’une logique démocratique libérale où les controverses sont assumées comme des conséquences de positions et d’intérêts divergents. Elle est donc un enjeu central de pouvoir. Les experts, comme les avocats, s’apparentent bien souvent à des porte-paroles et défenseurs d’organisations. Aux États-Unis, les think tanks représentent de véritables prototypes de ce modèle pluraliste, libéral et politisé de l’expertise, là où leur moindre développement en France a pu participer, aux côtés de la relative marginalisation des acteurs et institutions universitaires, à l’« enclavement administratif des experts français » (Le Bourhis, 2021 : 61).
Cependant, il faut nuancer cet apparent contraste entre une endogénéisation française et une pluralisation américaine de l’expertise. Non seulement la France connaît une ouverture et une pluralisation de l’expertise, mais la frontière entre société et État n’est pas toujours nettement délimitée. Hugh Heclo (1943-2017 ; 1984) a pointé l’existence d’une « haute fonction publique informelle » aux États-Unis, formée de « public careerists » circulant entre organisations non gouvernementales et administrations. Étudiant la politique de protection maladie, Ulrike Lepont (2016) a montré comment les experts les plus régulièrement consultés entre 1970 et 2000, présentés comme « health policy specialists », constituent un vivier de spécialistes investis sur le long terme dans la réflexion et le conseil sur les politiques publiques. Ainsi se reconstitue à l’extérieur de l’État un espace organisé de l’expertise, relativement homogène, disponible pour les décideurs, contrôlant relativement bien l’accès aux positions stratégiques de l’expertise. Cette « péri-administration », qui témoigne d’une forme d’interpénétration entre les deux sphères publique et privée, fait une place relativement résiduelle au secteur privé lucratif.
Quelle que soit la culture politique à l’œuvre, qui conduit à envisager l’expertise sous des jours différents, il convient de rappeler que l’expertise ressort partout comme un répertoire mobilisé par les groupes d’intérêt pour accroître leur influence et pour servir leurs intérêts. Les groupes peuvent aussi bien contribuer à l’état des connaissances qu’à la production d’ignorances, comme cela a pu être mis en évidence au sujet d’acteurs économiques liés au tabac, à l’amiante, au plomb ou à d’autres secteurs toxiques (Gilbert et al., 2015). Daniel Benamouzig et Joan Cortinas Muñoz (2022) le montrent notamment dans leur ouvrage consacré aux groupes d’intérêt du secteur agroalimentaire. Ils y évoquent les trois grands types d’activités politiques déployées par les groupes, avec des acteurs associés et spécialisés dans chacune des activités : cognitives, relationnelles, symboliques. L’expertise y joue un rôle central au niveau des activités cognitives. Eux-mêmes financeurs de recherches scientifiques, en posant des questions définies par l’industrie, les groupes cherchent à créer de l’ignorance par des mécanismes subtils : cadrage du questionnement en creux ou formulation nuancée. Une manufacture du doute est alors à l’œuvre, visant à discréditer les résultats de recherches scientifiques existantes.
Le recours à l’expertise comme un répertoire d’action et de pression n’est pas réservé aux seuls groupes qui défendent principalement des avantages matériels, traditionnellement désignés comme des « lobbys » en France. L’adoption d’une posture d’expertise peut parfaitement être le fait d’acteurs qui affichent un engagement idéologique explicite tout en se positionnant sur un registre scientifique afin de conforter certains de leurs arguments, voire de leur faire reconnaître une validité universelle (Delmas, 2011). Ce recours à la science (produire ou mettre en forme une expertise considérée comme objective) intervient parallèlement à d’autres registres comme l’appel au nombre (manifestations, pétitions) ou la mobilisation de la vertu, registre qui joue sur les ressorts de la scandalisation, à l’image des scandales sanitaires successifs : scandale du sang contaminé (qui éclate en 1991 et revient sur la distribution de produits sanguins contaminés à des hémophiles dans les années 1980) ; scandale de l’amiante (qui éclate dans les années 1990, avec l’organisation notamment d’un procès et qui désigne le délai entre la prise de conscience des dangers sanitaires et le délai de réaction des pouvoirs publics) ; scandale du Mediator (qui éclate en 2010 avec la publication du livre Mediator 150 mg : combien de morts ? de la pneumologue Irène Frachon).
La mobilisation de savoirs par les groupes sociaux a partie liée à l’affirmation d’« experts » en tant qu’« entrepreneurs de protestation », c’est-à-dire en tant que militants moraux apportant leurs réseaux de soutien, compétences et savoir-faire (Neveu, 1996 : 56). S’observe ainsi un « militantisme de dossier » (Ollitrault, 1996). Il se traduit par un ensemble de phénomènes variés comme le recours à une rhétorique de la neutralité et de l’objectivité, la mobilisation et parfois conduite en propre de travaux scientifiques, les mises en forme savantes. Ce qui contribue à transformer les recrutements, valorisant les diplômes au détriment de l’expérience militante, ainsi qu’à spécialiser et professionnaliser des tâches.
Face à la domination des systèmes experts répondent des formes de contre-expertise mobilisées par des groupes sociaux qui cherchent à les contrer sur leur propre terrain de la « crédibilité » technique (Mouchard, 2009). L’expertise figure en bonne place parmi les formes protestataires, plus ou moins codifiées, disponibles pour soutenir une mobilisation (Neveu, 1996) et permet d’accéder aux processus décisionnels et d’acquérir une forme de légitimité. Le phénomène n’est certes pas récent, mais il s’est globalement renforcé. On peut citer l’exemple de la Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité (Criirad) qui s’est créée après l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl (26 avril 1986) et suite à la difficulté d’accéder à l’information sur le risque nucléaire et à la possibilité de confronter les sources. Une expertise s’est ainsi développée au sein de la Criirad face à « la situation du monopole de l’information ». Nous pouvons également mentionner les travaux du biologiste Gilles-Éric Séralini qui s’est rendu célèbre avec la publication, en 2012, d’une étude toxicologique financée par le Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique (Criigen), fondé par Corinne Lepage (ancienne ministre de l’Environnement), dont il préside le conseil scientifique. En réaction au laxisme supposé de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), l’étude mettait en doute l’innocuité du maïs génétiquement modifié NK 603 et du Roundup sur la santé de rats. Cette étude, ainsi que les méthodes utilisées pour la médiatiser, ont fait l’objet de virulentes controverses (instrumentalisation de la science, fraude scientifique).
La contre-expertise peut parfois aussi être le fait de riverains, prenant les traits d’une épidémiologie populaire dans l’exemple des « clusters », désignant le « regroupement dans le temps et l’espace de cas de maladies, de symptômes ou d’événements de santé au sein d’une population localisée » (InVS, 2005 : 5). La fréquence inhabituelle de pathologies se voit ici associée à la présence de sources polluantes, notamment industrielles. Le signalement auprès des autorités de santé pour entreprendre des études scientifiques et des actions de contrôle des risques de santé se voit souvent non validé par la recherche épidémiologique, à l’image des cancers pédiatriques touchant des écoliers de l’école maternelle Franklin Roosevelt, située sur le site de l’ancienne usine Kodak à Vincennes, reconvertie en une résidence privée, mixant bureaux et immeubles d’habitations. L’affaire environnementale et médiatique éclate en 1999. Devant le refus de l’Institut de veille sanitaire (InVS) de mener des investigations complémentaires se monte le collectif « Vigilance Franklin » auquel est associé un toxicologue. Il obtient la mise en place d’un comité scientifique chargé d’étudier les demandes qu’il formule, d’établir un programme d’études épidémiologiques et environnementales, et d’auditionner des experts. Le toxicologue qui lui est associé démissionne très vite du comité, dénonçant des confusions d’intérêt et un refus de prendre en compte les demandes du collectif. Parallèlement, un comité de suivi rassemblant organismes et associations est mis en place (Calvez, 2009). Ce n’est là qu’un exemple d’une démultiplication des (contre-)expertises autonomes, associatives et citoyennes.
Une expertise questionnée et mise en doute
Une crise épistémique semble menacer des démocraties confrontées à la revendication de « faits alternatifs » et à l’affirmation d’une post-vérité (post-truth). Désormais, il faut « faire avec la défiance » pour paraphraser un rapport de France Stratégie (Agacinsky, 2018). De manière provocatrice, Tom Nichols (2017) titrait sur la « mort de l’expertise » en s’intéressant aux dispositions individuelles qui sapent l’autorité des experts : propension des individus peu qualifiés à surestimer leurs capacités cognitives et leur savoir et à se replier sur leurs connaissances plutôt que sur les avis experts (les psychologues américains David Dunning et Justin Kruger [1999] ont mis en évidence l’effet « Dunning-Kruger », biais qu’ils attribuent à une difficulté métacognitive des personnes non qualifiées, les empêchant de reconnaître exactement leur incompétence et d’évaluer leurs réelles capacités) ; surestimation encouragée par l’augmentation de l’estime de soi que favorise l’accès à un enseignement supérieur (quand les universités deviennent des écoles de rattrapage) ; adhésion à l’idée que chacun a le droit d’avoir une opinion sur un sujet (rejet de l’élitisme) ; résistance aux informations qui contredisent ces informations et recherches – facilitée par internet – de preuves qui confortent les croyances (biais cognitifs), etc.
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Effet Dunning-Kruger. Source : Florence Rebsamen-Roy (Crem).
Alors que les sciences et techniques sont mises en cause en tant que sources d’innovations, l’expertise scientifique à destination politique, invitant les capacités de la science à diagnostiquer et à réguler les risques, apparaît comme un point clé de cette nouvelle configuration (Granjou, 2003). Elle ressort simultanément comme indispensable mais faillible, tant d’un point de vue moral que technique.
La question morale de l’expertise engage celle de l’indépendance et de la neutralité des experts, lorsqu’elle n’est pas explicitement mobilisée comme répertoire d’action déployé au service des groupes. L’indépendance forme, avec le contradictoire et la transparence, les trois grands principes du modèle procédural de l’expertise (Roqueplo, 1997 ; Godard, 2003 ; Setbon, 2004). Historiquement, une controverse a pu opposer Walter Lippmann (1889-1974 ; 1922), célèbre journaliste et commentateur américain, et le philosophe John Dewey (1859-1952 ; 1927). Le premier louait la capacité des experts, invités à contrôler les médias, à s’abstraire de leurs propres intérêts pour mieux servir l’intérêt général, quand le second doutait, au contraire, de leur supposé désintéressement. Les experts défendraient le point de vue qui les avantage et qui conforte leur positionnement tant social que professionnel (Bantigny, 2011). Cet intéressement revêt des atours relativement discrets et indirects, comme il épouse parfois des formes directes et manifestes au point de se confondre avec des déviations, de questionner la probité des experts et de leurs relations de dépendance avec les intérêts en présence. Ces dernières sont d’ailleurs devenues le point focal des controverses sanitaires et environnementales (Gilbert et al., 2015).
Des déviations ont, par exemple, pu être observées du côté des groupes d’experts, créés et mobilisés par la Commission européenne, dont la composition signalerait la mainmise des grands patrons de l’industrie sur les structures et, in fine, les processus décisionnels, avec l’assentiment de fonctionnaires européens (Robert, 2010). De manière générale, c’est l’indépendance des experts eux-mêmes qui peut être sujette à caution. Au niveau européen, des affaires ont ainsi éclaté au sujet du manque d’indépendance et des conflits d’intérêts d’experts appartenant à des instances spécifiques (comités, agences) dotées, à ce titre, d’un pouvoir décisionnel formel. On peut citer les exemples des experts vétérinaires défendant les productions agricoles nationales dans le cas de la crise de l’encéphalopathie spongiforme bovine (Boudant, 1997), la politique européenne ayant eu tendance à sous-estimer l’hypothèse de la transmissibilité à l’homme (Barbier, 2003) ; du recrutement de la coordinatrice scientifique du panel OGM de l’Agence européenne de sécurité des aliments (AESA), quelques semaines après son départ de l’agence en 2009, par une société agrosemencière directement concernée par les avis de l’AESA. Cet exemple illustre le phénomène dit de revolving door, lorsque des membres des autorités publiques rejoignent ensuite des entreprises contrôlées, semant le doute sur leurs avis passés (Hauray, 2015). En France, le scandale du Mediator a aussi vu la dénonciation des liens entre le laboratoire Servier et l’agence française chargée des médicaments. Alors que le conflit d’intérêts est devenu un mode privilégié de problématisation des processus d’expertise, les pouvoirs publics ont renforcé leur encadrement juridique : adoption du Physician Payments Sunshine Act aux États-Unis, imposant des déclarations aux fabricants ayant des liens avec les médecins et les hôpitaux universitaires ; loi française du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, complétée par le décret du 9 mai 2012 relatif à la déclaration publique d’intérêts et à la transparence en matière de santé publique et de sécurité sanitaire (généralisation d’une obligation de déclaration publique d’intérêts).
À la possible faillibilité morale d’experts s’ajoute le problème plus général de la faillibilité technique des systèmes d’experts. Nous sommes passés « d’une construction de la certitude à un approfondissement de l’incertitude », écrivait Pierre Lascoumes (2002 : 377). Ce problème est particulièrement prégnant pour ce qui concerne la gestion des risques. Ulrich Beck (1944-2015 ; 1986) a théorisé la société du risque comme le fait de ne plus seulement rentabiliser la nature et libérer l’homme des contraintes traditionnelles, mais aussi et surtout de résoudre les problèmes induits par le développement techno-économique lui-même. La production de richesses est ainsi systématiquement corrélée à la production de risques, imposant des promesses de sécurité face aux assauts d’une opinion publique vigilante et critique. Mais plus la demande d’expertise croît, plus les experts semblent faillir face à des objets technologiques dont la prolifération dépasse le rythme de l’expertise. Des risques sont imputés à la science en même temps qu’on se tourne vers elle pour tenter de contenir ces risques. Une crise de confiance des citoyens vis-à-vis de l’État et des experts est apparue à mesure que les crises sanitaires et les catastrophes industrielles actualisaient divers risques (Tchernobyl, OGM, Sida, amiante, sang contaminé, vache folle, pollutions chimiques, changements climatiques). Aux problèmes liés à l’état des connaissances, à leur capacité à réguler et maîtriser les risques, s’ajoute le fait que les experts peuvent transgresser inéluctablement les limites de leur propre savoir (Roqueplo, 1997), quand ils ne sont pas invités à le faire par un mandataire.
Expertise et débat public : le problème en tant qu’il est à débattre
Lorsque les risques s’avèrent particulièrement difficiles à appréhender (occurrence, calcul des dommages), que les champs d’ignorance égalent ou dépassent ceux de la connaissance, cela autorise les sciences humaines et sociales à intervenir dans le champ de l’expertise, du fait même des limites des sciences dites « dures » et plus largement des citoyens. L’ampleur des incertitudes réduit en quelque sorte l’asymétrie entre expert et non-expert. Le devenir des pratiques d’expertise se voit lié à leur capacité à se démocratiser et à organiser une expertise plurielle ouverte aux profanes (Lascoumes, 2002). Au sujet de la gestion publique des OGM, le Collectif sur les risques, la décision et l’expertise (Cride, 2000) avait conclu à un changement paradigmatique invitant à élargir les arguments pris en compte dans les avis d’experts ainsi qu’à redéfinir les rapports scientifique/profane (Granjou, 2003).
À travers la difficile invention d’une culture du débat public se joue possiblement une redéfinition de l’expertise comme moyen de susciter le débat et d’offrir une opportunité aux velléités participatives de la société civile. C’est en quelque sorte une nouvelle synergie qui est recherchée entre science et citoyenneté (Jasanoff, 2004). Se pose la question d’une alliance entre l’expertise et l’action politique, entendue comme possibilité d’un choix collectivement légitimé de priorités et de modalités d’action, donc l’existence d’alternatives. Il faut ainsi articuler deux logiques distinctes de légitimation de l’action publique, la publicisation (débat) et la rationalisation (expertise). Nous passons alors du problème en tant qu’il est à résoudre au problème en tant qu’il est à débattre (Ravon, Fritsch, 1993). Le droit de parole et le droit de critique publique de l’expertise intègrent l’expertise elle-même et ses conditions de légitimité publique (Ravon, 1993). La problématique de l’expertise constitue ainsi le nœud d’un nouveau « cadrage » des relations entre sciences, politique et société (Granjou, 2003), dans lequel les experts doivent ouvrir et non clore la discussion (Lagadec, 1981).
Cette rencontre entre les exigences techniques et démocratiques connaît diverses formes d’institutionnalisation traitant d’objets eux-mêmes différenciés. Dans leur Essai sur la démocratie technique, Michel Callon, P. Lascoumes et Yannick Barthe (2001) exposaient, de manière prescriptive, une démocratisation simultanée des processus d’établissement des énoncés politiques et scientifiques au moyen des forums hybrides. Ces lieux de rencontre des techniciens, des politiques et des citoyens assument l’organisation de controverses scientifiques et techniques avec l’objectif de diagnostiquer les problèmes et de définir des programmes d’action publique : enquêtes publiques, groupes de discussion (focus groups), conférences de consensus, etc. Aussi bien pour ces dernières que pour les jurys de citoyens (Barbier et al., 2009), le pari est fait d’une montée en compétence de participants, tirés au sort, mis au contact d’une expertise pluraliste et contradictoire et qui, ensuite, délibèrent afin d’accomplir la tâche qui leur est demandée par le commanditaire de rendre un rapport et de formuler des préconisations.
Cette mobilisation des citoyens irrigue aussi les démarches évaluatives dites « pluralistes » ou « participatives », le plus souvent observées dans des secteurs tels la santé, le social ou l’éducation. La démocratisation du processus évaluatif poursuit une finalité pratique, pariant sur l’amélioration de l’utilisation de l’évaluation grâce à une plus grande profondeur et une participation active des utilisateurs primaires au processus, et/ou une finalité émancipatrice, qui vise principalement à rendre les individus ou les groupes d’acteurs (en particulier les plus défavorisés) plus autonomes grâce aux effets endoformatifs d’apprentissage liés à leur participation au processus évaluatif (Plottu, Plottu, 2009). L’évaluation assume ici sa part de normativité (value engaged), rompant avec une conception traditionnelle de l’évaluation (de type gestionnaire) qui se veut neutre, fondée sur le travail de l’évaluateur (en tant qu’expert extérieur) qui s’appuie sur des données objectives quantifiées.
En tant que propriété situationnelle, l’expertise mobilise donc bien au-delà des seuls individus susceptibles de satisfaire des critères traditionnels de connaissance et de compétences, au point de déboucher, le cas échéant, sur l’oxymore d’« expertise profane ». Il s’agit ici d’inviter des « savoirs d’usage » à se manifester dans des dispositifs pour partie prévus à cet effet (rôle du débat public) ou relever de contre-expertises qui échappent à toute forme de demande préalable ou d’institutionnalisation. Mais ne faut-il pas restreindre la notion d’expertise de manière à éviter son suremploi et la confusion qui en découle ? Ce qu’appelle de ses vœux Jérôme Lamy : « Entre les scientifiques appointés par les États, dans un service spécifique des ministères, et les habitants d’un quartier délibérant des enjeux urbains, l’écart des pratiques, des acteurs engagés, des enjeux politiques est si grand qu’une même notion ne peut recouvrir les deux situations » (Lamy, 2019).
Tous ces enjeux autour de l’expertise de collectivisation et de démocratisation, de pluralisme et de transparence conduisent à en brouiller l’identification (Cadiou, 2006). La question de la conciliation de l’expertise avec le pluralisme se pose, tant épistémologique (coexistences d’approches expertes différentes) que politique (expression des divers intérêts). L’appel à une expertise plurielle et ouverte à la société civile n’est en tout cas pas sans effet sur les modalités de travail et la publicisation d’une expertise contradictoire, dans le cadre d’une démocratie dialogique (Callon et al., 2001).
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